Le pacte d’actionnaire

L’ADAE (1) organisait un petit déjeuner sur le sujet du pacte d’actionnaires. Me Benedict Vidal, associé au cabinet Carler, en était l’intervenant. Il a campé le décors et nous avons pu échanger sur ce sujet passionnant. Bien évidement, il concerne les actionnaires ou associés. Les parts d’une entreprise ne peuvent être réduites à un élément patrimonial des investisseurs, anodin et strictement comparable à des objets. J’écrivais ici en 2014 qu’il nous faudrait en bonne logique parler de « droits et devoirs sociaux », puisque la détention de ces titres implique aussi des obligations vis à vis de la société elle-même.

Remy Mahoudeaux

Un administrateur indépendant qui n’a par définition pas accès au capital n’est pas l’une des parties du pacte d’actionnaires, mais dans la mesure où il est l’un des rouages de la gouvernance de l’entreprise, il lui est nécessaire de connaître les engagements réciproques de chacune de ces parties, puisqu’ils organisent entre autre la gouvernance et impactent la stratégie.

Au delà des aspects purement techniques du pacte d’actionnaire (sa relative porosité avec les statuts d’une SAS, les restrictions et conditions de transmissions des parts sociales, le mode d’organisation de la gouvernance), se pose la question du conflit d’intérêt permanent qui subsiste et qui relève de l’existentiel. Une entreprise, parce qu’elle est une personne morale distincte de son ou ses associés, a des intérêts qui peuvent se révéler antagonistes avec ceux-ci. La mise en œuvre de dispositions d’un pacte d’actionnaires peut, parfois, conduire à des décisions ou des actions toxiques pour l’entreprise elle-même : une sortie obligatoire prématurée, un dévoiement de la gouvernance par micro-management, une politique de distribution insane ou inadaptée à des contextes d’affaires fluctuants, la liste n’est pas exhaustive.

Bien évidement, même si les pactes sont au service des actionnaires et pas de l’entreprise, ils restent des outils qui peuvent se révéler pertinents et efficaces. Tout est affaire de jugement, face à une situation d’affaire qui n’a jamais été anticipée dans tous ses détails et circonstances, est-ce que la lettre du pacte doit s’imposer, ou faut-il en privilégier l’esprit, et se mettre en quête du meilleur consensus des parties prenantes adaptés à la lueur des engagements passés et d’un contexte ? La lecture rigoureuse doit parfois s’effacer devant le pragmatisme.

La convivialité de l’ADAE n’enlève rien à son professionnalisme, cela mérite d’être écrit, alors je le fais sans vergogne en assumant avec transparence mon conflit d’intérêt.

(1) L’ADAE (Association des Dirigeants et Administrateurs d’Entreprise) que préside Daniel Corfmat a pour objectif de promouvoir la gouvernance au sein des PME depuis 1996 avec 4 axes d’actions principaux :

  1. Informer les parties prenantes ;
  2. Former ses membres (1ère formation d’administrateur qualifiés indépendants en entreprise en France AQI®);
  3. Réfléchir sur la doctrine et établir/proposer des « softlaws » ;
  4. Diffuser ses travaux.

 

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